Le 21 octobre 2022, ENACT a organisé un événement parallèle lors de la 11ème Conférence des Parties de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, ou Convention de Palerme. La Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée est le principal instrument international de lutte contre la criminalité transnationale. La nécessité d’encourager la coopération internationale ayant été identifiée comme une condition nécessaire pour s’attaquer efficacement à ce problème, le GIFP et son approche transrégionale s’inscrivent dans le cadre plus large de la Convention. Au cours de cet événement, les panélistes ont examiné dans quelle mesure la Convention est utilisée en Afrique et ont évalué son impact sur les marchés criminels et la résilience des États face au crime organisé.
Natalie Pauwels, chef de l’unité Stabilité et paix – Menaces globales et transrégionales à la Commission européenne, a ouvert la session en présentant l’Indice du crime organisé en Afrique, un outil multidimensionnel qui évalue la criminalité et la résilience des pays africains et présente l’architecture criminelle globale du continent.
Darren Brookbanks, analyste au GI-TOC, a présenté la recherche qui s’est appuyée sur l’indice et a examiné la mise en œuvre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée par les pays concernés. La Somalie et le Soudan du Sud, deux pays qui n’ont pas ratifié la Convention, obtiennent un score élevé en matière de criminalité et faible en matière de résilience. D’autres pays, comme le Ghana, qui l’ont ratifié voient leur résilience augmenter. Toutefois, les premières tendances doivent être étudiées de plus près pour parvenir à des conclusions plus complètes. La ratification généralisée de la Convention sur le continent démontre la volonté politique de s’attaquer au crime organisé. Si des efforts sont également déployés pour accroître la coopération internationale, ils sont entravés par le manque de données communiquées, la lenteur de la résolution des affaires et les préoccupations relatives aux droits de l’homme.
Olwethu Majola, chercheur à l’Université du Cap, a mis l’accent sur les difficultés à analyser l’effet de la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée en raison du manque de données. Bien qu’elle ait été largement ratifiée, le degré de sa mise en œuvre n’est pas clair. Les données ne sont pas concluantes et ne montrent pas actuellement de lien entre la ratification et une diminution de la criminalité, et, en fait, les marchés criminels sont en augmentation dans toute l’Afrique. Mme Majola a déclaré que la Convention n’est pas suffisamment utilisée, en raison d’un manque d’appropriation, de responsabilité et d’adhésion au niveau local. La création d’un référentiel central, que les groupes thématiques du mécanisme d’examen de la Convention et l’Indice du crime organisé pourraient alimenter, aiderait à établir une méthodologie pour évaluer l’impact de cette convention. Les variables pourraient inclure : la législation et les accords nationaux, régionaux et internationaux ; les résultats des demandes d’assistance juridique mutuelle et d’extraditions ; les enquêtes et les poursuites ; les réseaux et les cadres de coopération internationale ; les activités de renforcement des capacités et de formation des partenaires du développement ; les marchés criminels et les données sur la résilience des États ; et les études de cas des marchés criminels, des pays et des questions/préoccupations.
Enfin, Martin Ewi, coordinateur régional d’ENACT pour la criminalité organisée, a souligné l’importance d’examiner les aspects négatifs et positifs de la volonté politique qui sous-tend la Convention et les protocoles sur les armes à feu, le trafic de migrants et la traite des êtres humains. En examinant dans quelle mesure l’Afrique met en œuvre la Convention, M. Ewi a abordé la question aux niveaux national, régional et continental.
La Convention a été ratifiée par la majorité des pays, ce qui témoigne d’une large volonté politique ; cependant, peu d’entre eux ont ratifié les trois protocoles additionnels, et de nombreux pays doivent encore élaborer des plans nationaux complets pour lutter contre ces crimes. En effet, de nombreux pays n’ont pas adopté de législation incriminant la participation à des groupes criminels organisés (GCO), alors que cette disposition figure à l’article 5 de la Convention. Beaucoup a été fait contre le blanchiment d’argent, puisque 90 % des pays disposent d’une législation anti-blanchiment. Toutefois, ces lois sont moins efficaces lorsqu’elles ne sont pas liées à l’article 5. Bien qu’il y ait eu une bonne quantité de législation sur la criminalisation de la corruption conformément à l’article 8, la mise en œuvre reste faible.
Au niveau régional, M. Ewi a fait remarquer que la situation générale est décourageante, les organisations régionales africaines ne prenant pas le crime transnational organisé au sérieux et les efforts n’étant pas égaux entre les régions. La plupart d’entre elles disposent de cadres pour traiter les armes légères et de petit calibre (ALPC), mais pas de cadres plus larges pour traiter les TOC dans leur ensemble. Au niveau continental, l’Union africaine (UA) a une approche ad hoc des domaines thématiques de la Convention. Le contrôle des frontières est abordé de manière adéquate, et il existe divers cadres importants tels que la Déclaration de Bamako sur le trafic d’armes légères et de petit calibre, la campagne de l’UA pour faire taire les armes à feu et les plans d’action visant à lutter contre la traite des êtres humains.
Il est donc nécessaire de renforcer les capacités pour comprendre et mettre en œuvre la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, y compris les protocoles additionnels, afin d’encourager les décideurs politiques et les parties prenantes à s’engager sur la base de leurs connaissances. C’est pourquoi les ressources et les informations, telles que les études et les séminaires réalisés par des organisations internationales, sont essentielles.